LE GALLO-ROMAN: L’HISTOIRE EXTERNE (Ve –VIIIe ss. de notre ère)
^ Вверх

Module III

 

LA PREHISTOIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE:

LE GALLO-ROMAN (Ve –VIIIe ss. de notre ère)

 

Les objectifs d’étude

Etudier l’histoire externe de l’évolution du gallo-roman

Apprendre les particularités linguistiques du gallo-roman

 

L’apprenant doit savoir:

Les limites temporelles de l’époque étudiée

Les termes employés dans le Module

Les principaux événements historiques de l’époque étudiée (l’histoire externe)

Les principales mutations et tendances phonétiques, grammaticales survenues en gallo-roman (l’histoire interne)

Les changements dans le vocabulaire du gallo-roman (l’histoire interne)

 

L’apprenant doit savoir faire:

Analyser les principales tendances phonétiques, morphologiques, syntaxiques, lexicales de l’époque

Etablir les relations structurales entre les changements linguistiques tenant compte que la langue est un système

Préciser les origines (latines, celtiques, germaniques) des changements survenus ou se déroulant à cette époque

Déterminer les causes des évolutions linguistiques se produisant en gallo-roman

Mettre en rapport les faits historiques (externes) et les faits linguistiques (internes)

 

Les travaux dirigés

 

LE GALLO-ROMAN: L’HISTOIRE EXTERNE (Ve –VIIIe ss. de notre ère)

 

L’objectif d’étude

Etudier les conditions historiques dans lesquelles le gallo-roman évoluait

 

L’apprenant doit savoir donner la définition des termes suivants: le roman commun, le gallo-roman,la germanisation, le superstrat germanique, la Renaissance carolingienne, la langue d’oc, la langue d’oïl

 

L’apprenant doit savoir:

Les limites temporelles de l’époque étudiée

La définition des termes du cours

Les principaux événements historiques de l’époque (l’histoire externe)

Les causes de la chute de l’Empire romain au IVe s. de n.ère

Les origines de la Renaissance carolingienne

Les sources de nos connaissances sur le gallo-roman

 

L’apprenant doit savoir faire:

Analyser les causes de la chute de l’Empire romain

Expliquer les causes de l’assimilation du gallo-roman par les Germains

Présenter et comparer les sources de nos connaissances sur le gallo-roman

Analyser les origines de la différence entre la langue du Sud et la langue du Nord de la Gaule

 

Le plan

I. La chute de l’Empire romain (Ve s. de n.ère). Les invasions germaniques.

II. La germanisation de la Gaule romanisée.

1. Le gallo-roman.                   

2. Charlemagne et la renaissance carolingienne.

III. Les  sources de nos connaissances sur le gallo-roman.

IV. Le schéma récapitulatif de la préhistoire du français.

 

I. La chute de l’Empire romain (Ve s. de n.ère). Les invasions germaniques.

 

Avant les invasions germaniques (IIIe – IVe ss.) l’Empire romain, la Gaule romaine y comprise, vit une période de prospérité et de stabilité. Mais, dès la fin du IIe s., la vie dans l’Empire commence à se disloquer. Cette tendance s’accentue à partir du IIIe s. de n. ère avec les incursions des Germains: Goths, Ostrogoths, Wisigoths, Vandales, Saxons, Burgondes, Alamans, Francs Rhénans et Francs Saliens, etc. C’est l’an 375 de n. ère que l’on considère comme marquant le début des grandes invasions et le commencement de la dislocation de l’Empire romain.

En 476 de n. ère Romulus Augustule, le dernier empereur d’Occident, est déposé par des barbares germaniques, les Hérules. L’Empire romain d’Occident est partagé par les Germains et disparaît, laissant la place à la fondation de plusieurs empires germaniques. Mais les peuples germaniques ne peuvent constituer d’États durables et morcellent constamment leurs territoires conquis.

Finalement les Francs Saliens, menés par Clovis, sortent grands vainqueurs de ces affrontements en soumettant presque toute l’Europe romanisée à leur autorité. Clovis étend ses États de la Loire jusqu’au Rhin. En 486 de n. ère il se convertit au christianisme, religion officielle des Gallo-Romains. Ce faisant, les Francs obtiennent l’appui des Gallo-Romains, ils acceptent aussi le latin comme langue religieuse. La France ainsi que la Franconie – une région d’Allemagne – doivent leurs noms aux Francs.

L’invasion barbare des Ve – VIe ss. de n. ère met en déclin la haute culture latine, les arts et les sciences ne se développent plus et se dégradent. Les communications avec la métropole (Rome) étant coupées, les échanges commerciaux périclitent, les routes deviennent peu sûres, le tout entraînant une économie de subsistance rurale et fermée sur elle-même. Le nombre d’écoles qui constituaient la source essentielle de la formation des milieux instruits et, de ce fait, servait du support le plus important de la culture, décroît.

 

II. La germanisation de la Gaule romanisée.

 

1. Le gallo-roman.                         

Du point de vue linguistique, l’effondrement de l’Empire romain d’Occident accélère le processus de morcellement du latin populaire, amorcé dès le II e s. de n. ère.

Sur les territoires de l’ancienne Gaule le latin oral se transforme progressivement, en fonction de l’influence germanique, en une langue parlée que l’on appellera le roman commun ou le gallo-roman (dérivé de romain).

Le morcellement des royaumes germaniques et l’absence de centralisation bureaucratique empêchent les vainqueurs d’imposer leur langue germaniques aux Gallo-Romains. D’abord, le nombre insignifiant de Francs (environ 5%) par rapport à la population gallo-romane leur interdit d’imposer le francique, langue maternelle des Francs Saliens, à tout le pays, cela veut dire germaniser la Gaule romaine. Puis, la vieille civilisation latine était supérieure à la civilisation dominante germanique. Il se produit alors un fait linguistique assez rare: contrairement à ce qui s’est passé lors de la colonisation latine, c’est la langue dominée, le latin transformé en roman commun, qui demeure la langue maternelle dans les royaumes des Germains. Cette fois ce sont les barbares germaniques qui assimilent le latin des peuples romanisés au détriment de leurs idiomes germaniques maternels. Mais les parlers des vainqueurs laissent leurs traces dans les langues romanes, surtout dans le phonétisme et le vocabulaire (superstrat germanique).

Le latin reste la langue officielle des nouveaux états barbares qui se forment partout en Europe, ainsi que celle de l’église, de la science, de la loi et de l’enseignement. Notons que c’est par l’inspiration chrétienne que la littérature latine contunuera à vivre (saint Jérôme, saint Augustin) et que le latin restera jusqu’à la Renaissance la langue des intellectuels de l’Occident. Mais ce latin classique diffère nettement de la langue parlée qui est le gallo-roman.

Alors que la langue simplifiée des Gallo-Romains est accessible au peuple, il devient impossible de faire comprendre un texte de vrai latin à celui qui ne l’a pas étudié. La langue de l’église est le latin que les peuples romanisés (et puis germanisés dans une certaine mesure) ne comprennent plus. C’est pourquoi la décision du Concile de Tours prise en 813 prescrit aux prêtres de traduire «leurs homélies latines» et de prêcher en langue romane populaire (lingua romana rustica). Cette décision du Concile est la première reconnaissance officielle de la langue française; ce document est considéré comme fondateur du français. C’est de ce jour-là que les clercs se préoccupent de mettre par écrit – et donc d’élaborer et de fixer – leur langue maternelle, la future langue française.

Bien avant les invasions germaniques la Gaule se divisait déjà en deux zones linguistiques: le Midi et le Nord. La chute de l’Empire romain, mais surtout l’invasion germanique accentuent et approfondissent cette opposition du Nord et du Midi de la France, car en raison des contacts durables et fréquents avec les idiomes germaniques ( = en raison de la germanisation), le gallo-roman  du Nord se modifie davantage qu’au Sud de l’ancienne Gaule).

Dans le Midi, les dialectes où la particule affirmative oui se dit oc, seront appelés par la suite dialectes de langues d’oc (la langue d’oc, le futur provençal), et dans le Nord, les dialectes où la particule affirmative oui se dit oïl, seront définis plus tard les langues d’oïl (la langue d’oïl, le futur français). La zone de colonisation franque – la France du Nord, où les Francs émigrèrent en nombre important correspond au français d’oïl.

L’ancien français issu des dialectes d’oïl s’est formé vers le IXe s.

 

2. Charlemagne et la renaissance carolingienne.

Sous la dynastie mérovingienne (Ve – VIIe ss.) le royaume franc se divise en trois parties: l’Austrasie – à l’Est de la Gaule, la Neustrie – au nord-ouest de la Gaule, la Bourgogne –  la partie entre les deux premières.

Depuis le VIIIe s. la deuxième dynastie appélée carolingienne (du nom de son fondateur Charlemagne (Carlus Magnus, Charles le Grand, 742 – 814 de n. ère) prend le pouvoir dans l’état des Francs romanisés. Il agrandit considérablement son état: lorsqu’il est couronné empereur du Saint Empire romain germanique en décembre 799 de n. ère, son royaume s’étend du nord de l’Espagne jusqu’aux limites orientales de l’Allemagne actuelle, de l’Autriche et de la Slovénie. Mais l’unification politique réussie par Charlemagne ne dure pas assez longtemps pour que celui-ci impose dans tout son empire le francique, sa langue maternelle.

Charlemagne entreprend la réimplantation de l’ancien Empire romain. Ce célèbre homme d’état s’intéresse à la culture antique et fait beaucoup pour la faire renaître. Il vise à restaurer une culture chrétienne en Occident, c’est pourquoi son époque est appélée la Renaissance carolingienne. Partout en Gaule réapparaissent des écoles laïques de tradition latine où l’on enseigne la grammaire, la rhétorique et le droit latins.

Après la mort de Charlemagne son empire a été partagé d’après le traité de Verdun de 843 entre ses trois petits-fils: Louis le Germanique, Charles le Chauve et Lothaire. L’Etat carolingien est coupé en trois parties. Un an plutôt Louis le Germanique et Charles le Chauve concluent un pacte d’alliance contre leur frère Lothaire. Ce document est connu sous le nom de Serments de Strasbourg. Ce texte atteste la naissance de la langue française.

 

III. Les  sources de nos connaissances sur le gallo-roman.

Tous les traités et chroniques du temps, la correspondance ecclésiastique et celle des chancelleries royales, ainsi que l’enseignement se font en latin médiéval appelé «bas latin», qui sont fortement teinté d’éléments du langage parlé local, le gallo-roman.

Les textes juridiques

Ayant adopté la culture et la religion romaines, les Germains calquent leur administration sur celle des vaincus et rédigent leurs lois en latin. Les lois barbares (Leges Langobardorum, Lex salica, etc.) sont rédigées en latin. Mais elles contiennent des fautes qui permettent de juger du degré de leur écartement du latin classique et de déterminer les tendances du développement du latin vulgaire évoluant en gallo-roman.

 

Les textes religieux

Les écrits théologiques, nombreux à cette époque, après une analyse minutieuse fournissent des données précieuses révélant les voies du développement de la langue.

 

Les  chroniques du haut Moyen Age

Les écrits de l’évèque Grégoire de Tours (538 – 594), notamment sa grande Histoire des Francs (Historia Francorum) (573, dix volumes en latin), et ceux de Frédégaire (VIIe s.) abondent en incorrections: les genres sont souvent confondus, les cas ne sont pas toujours respectés, le pronom démonstratif de la 3 e personne assume la fonction du pronom personnel, l’emploi de certains mots atteste des changements de sens, la graphie témoigne de modifications phonétiques (ti est rendu par ci, ae par e), etc. En réalité, ce ne sont pas des fautes, mais les premiers signes de la nouvelle langue qui est en train de se former à la base du latin de l’époque.

 

Les glossaires

Le gallo-roman comporte tant de spécificités lexicales et grammaticales qu’il apparaît à l’époques plusieurs glossaires avec les explications (dites gloses) des formes et des mots vieillis du latin classique au moyen des vocables romans. Les glossaires les plus importants sont ceux de Cassel et de Reichenau, tous les deux datant du VIIIe s.

 

Les fautes d’orthographe

Si, dans les manuscrits, on trouve souvent des confusions régulières, cela prouve qu’il ne s’agit pas d’une «faute», mais d’une tendance forte et précise. Par ex., s’il y a une confusion régulière de ae et e, b et v, ci et ti,  cela témoigne que la prononciation de chaque  son dans ces paires est la même et que ces transformations se sont déjà achevées en gallo-roman.

 

IV. Le schéma récapitilatif de la préhistoire du français.

 

Or, la préhistoire du français se présente comme suit:

 

IIe – Iier ss. an av. n. ère

le celtique

 

 Ie s. av. n. ère –  IIe s. de n.ère

le celtique + le latin vulgaire (bilinguisme)

ß

 Romanisation

 IIe – Ve ss.

latin vulgaire

ß

le roman commun

 

 Ve  –  VIIIe ss.

le roman commun+le francique

(bilinguisme)

ß

le gallo-roman

 Germanisation

 IXe s.,  842 an

l’ancien français

 

 

                                                                                                                   

Questions ( * - questions demandant des reflexions)

 

I. Quelles sont les limites temporelles du gallo-roman?

1. Quand commence la crise de l’Empire romain? Comment se manifeste-t-elle? Quelles en sont les causes?

Quel rôle ont joué les invasions des tribus germaniques dans l’écroulement de l’Empire romain?

* Quelle tribu germanique a réussi à former un etat unifié et solide sur le territoire de la France actuelle?

* D’où vient le nom de la France?

 

II. 1. * Est-ce que les Gallo-Romains ont été profondément touché par la germanisation? Pourquoi?

Pourquoi les Francs ont-ils abandonné leur langue maternelle et adopté le gallo-roman?

Est-ce que l’ancienne division linguistique de la Gaule subsiste?

Par quoi s’est-elle accentuée?

Comment est appelé l’idiome roman parlé au Nord de la Gaule? Pourquoi?

Comment est appelé l’idiome roman parlé au Sud de la Gaule? Pourquoi?

 

2. Qu’appelle-t-on «la Renaissance carolingienne»?

Qu’est-ce que Charlemagne voulait faire renaître? Pourquoi?

 

III. * Est-ce que les linguistes disposent de larges sources sur le gallo-roman? Quelles sont ces sources?

* Laquelle (lesquelles) de ces sources vous semblent la (les) plus sûre(s)?

Quels sont les premiers documents écrits de la langue française?

 

IV. Combien de langues ont participé à la formation de la langue française?

Est-ce que les apports ont été égaux?

 

 

Devoirs

1. Définissez: le roman commun, le gallo-roman,la germanisation, le superstrat germanique, la Renaissance carolingienne. 

2. Où retrouve-t-on les noms des anciennes tribus germaniques telles que les Goths, les Ostrogoths, les Wisigoths,  les Saxons, les Angles, les Burgondes, les Francs, les Alamans, les Vandales, les Langobardes? 

3. Trouvez sur la carte les régions de la langue d’oïl et de la langue d’oc.