EE2 Mot et notion. Nomination. Structure sémantique
Tout mot possède sa propre structure morphologique, sa valeur grammaticale. Les formes grammaticales organisent la matière lexicale, expriment les rapports entre les mots notionnels. Le sens grammatical est toujours abstrait. On distingue les mots autonomes (noms, pronoms, verbes, adverbes) et les mots-outils (expriment les rapports grammaticaux).
Tout mot est porteur de différentes fonctions. On distingue 3 fonctions essentielles des mots: rationnelle (logique), nominative et expressive (affective). La majeure partie des mots est appelée à rendre des notions. C’est leur fonction rationnelle. En traduisant les notions les mots désignent les objets, propriétés, faits ce qui constitue leur fonction nominative. (Jeanne, Paul – nomment certains êtres, les noms géographique traduisent des notions uniques – Paris, France). Les mots-outils n’ont pas de fonction nominative (expriment les rapports grammaticaux entre les faits). Les mots peuvent avoir une valeur neutre ou affective (expressive). La plupart des mots ont une valeur neutre: aller, faire, homme, femme. Les mots à valeur affective traduisent les sentiments humains, l’attitude de l’homme envers la réalité. Ce sont: coquin, nigaud, mouchard, flic, capitulard.
La signification lexicale reflète les liens du mot avec l’objet qu’il nomme. Ce sont les concepts qui déterminent la signification lexicale du mot (mais la signification lexicale est la catégorie linguistique, tandis que le concept est la catégorie logique). La signification est toujours concrète.
Les significations lexicales sont de trois types essentiels: nominatives, phraséologiquement liées et syntaxiquement conditionnées. Le caractère des rapports entre les mots à significations nominatives est déterminé par la réalité. (Mains – sales, propre, courte, longue, laide). Les significations phraséologiquement liées ne dépendent pas des rapports entre les faits de la vie réelle. Elles s’actualisent seulement dans les groupements tout faits (on emploie des clichets, groupements traditionnels) – remporter une victoire, obtenir un triomphe. Les significations syntaxiquementconditionnées s’actualisent dans des conditions syntaxiques particulières. (réction différente des verbes – distingue leurs signification: on use une chose – on use d’une chose, on manque une visite-on manque de patience. Les adjectifs postposés et préposés – leurs significations sont donc syntaxiquement conditionnées. – garçon méchant – une méchante cravate (mauvaise).
Il est évident qu’il n’y a pas de lien organique entre le mot, son enveloppe sonore, sa structure phonique et l’objet qu’il désigne. Pourtant le mot, son enveloppe sonore est historiquement déterminé dans chaque cas concret. Au moment de son apparition le mot ou son équivalent tend à être une caractéristique de la chose qu’il désigne. On a appelé vinaigre l’acide fait avec du vin, tire-bouchon – une espèce de vis pour tirer le bouchon d’une bouteille. Un sous-marin est une sorte de navire qui navigue sous les eaux et un serre-tête – une coiffe ou un ruban qui retient les cheveux. De même pour les vocables existant déjà dans la langue, mais servant à de nouvelles dénominations. Aiguille – le sommet d’une montagne en pointe aiguë grâce à sa ressemblance à une aiguille à coudre. L’enveloppe sonore d’un mot n’est pas due au hasard, même si elle paraît être. La table fut dénommée en latin «tabula» – planche parce qu’autrefois une planche tenait lieu de table. Le mot latin «calculus» (caillou) servait à désigner le calcul, car anciennement, on comptait à l’aide de petits cailloux. La dénomination d’un objet est basée sur la mise en évidence d’une particularité de cet objet. Le sens premier (originaire) est appelé sens étymologique.
Ainsi, sens étymologique du mot table est planche, linge – lat. lineus, adj. de lin; candeur – lat. candor, blancheur éclatante; rue-lat. ruga-ride. Travail – lat.pop. tripalium-instrument de torture; penser-lat.pensare-peser; traire – lat. traher-tirer. A l’époque actuelle le sens étymologique peut ne plus être senti. La question des mots motivés et immotivés est liée au sens étymoloogique, mais il n’y a pas de parallélisme absolu (sens étymologique appartient à l’histoire du mot, la motivation reflète l’aspect actuel). Tous les mots d’une langue ont forcément un sens étymologique, alors que beaucoup d’entre eux ne sont point motivés: Chaise, table, main, sieste, fortune. Motivés: journaliste, couturière, alunir, porte-clé, laisser-passer. La motivation de ces mots découle de leur structure formelle, et elle est conforme à leur sens étymologique.
Un mot peut être motivé non seulement par le lien sémantique existant entre ses parties consitutuantes, mais aussi par l’association qui s’établit entre ses diverses acceptions. Chenille dans chenille d’un tout-terrain est motivé grâce au lien métaphorique qui l’unit à son sens propre.Il est sémantiquement motivé dans son sens dérivé. Donc, la motivation est un phénomène intralinguistique qui est dû aux associations formelles et sémantiques que le mot évoque. Mais la motivation d’un mot n’est pas absolue. Il est difficle de dire pourquoi «coupe-gorge» sert à nommer un lieu, un passage dangereux, fréquenté par des malfaiteurs et non point, un instrument de suplice (coupe-légumes, coupe-papier, coupe-racines). Ce mot est relativement motivé. En principe tout mot est motivé à l’origine. Avec le temps le sens étymologique peut ne plus se faire sentir, ce qui amène souvent à leur démotivation. Cela se fait lentement, au cours des siècles. Le sens actuel des malheur et bonheur ne peut être que partiellement expliqué par leur premier élément mal et bon, heur-lat. Augurium-présage, chance ayant disparu de l’usage. Ces mots sont partiellement motivés. La démotivation peut aller plus loin et aboutir à la perte totale par un mot de son caractère motivé. Le mot s’il est isolé, séparé des mots auxquels l’un ou l’autre était autrefois associé. Tel est le sort de «chahuter» qui ne se rattache aujourd’hui ni à chat, ni à huer, et ne signifie plus crier comme un chat huant. Dans chaque langue on trouve des mots motivés et immotivés. Il n’y a pas de langues où rien ne soit motivé et où tout soit motivé. Le français se caractérise par l’arbitraire du signe. Si le mot est motivé, on dit qu’il possède une forme interne. Parfois cette forme interne est la même dans les langues différentes. Pourtant la forme interne des mots revêt le plus souvent un caractère national. Prunelle – de la petite prune (en russe du verbe – voir). Pommade – pulpe de pomme (en russe – enduire).
Le mot étymologie est emprunté au lat. etymplogia, du gr. etumologia, qui se rattache lui-même à l’adjectif «vrai». Dans l’Antiquité, c’était une recherche destinée à connaître le vrai sens des mots, parce que l’on croyait que celui-ci était nécessairment reflèté par la forme. L’étymologie est la partie de la linguitique qui étudie l’origine des mots. L’étymologie se dit aussie de l’origine d’un mot particulier. L’étymon est le mot qui est à l’origine du mot que l’on étudie: le mot français partir a comme étymon le latin vulgaire partire, lat. clas. partiri. L’étymologie sert à connaître le passé de la langue et fonde les relations existant à un moment donné entre les mots d’une meme famille.
Du point de vue de l’origine, les mots français peuvent être rangés en trois grandes catégories: le fonds essentiel, appelé fonds primitif, est constitué par le latin, auquel il faut joindre quelques survivances de langues antérieures et des mots pris aux Germains à la suite des invasions; – les mots empruntés à des langues étrangères depuis le moment où le français est devenu une langue distincte du latin; – les mots français formés à partir des mots des deux catégories précédentes.
Le mot français est avant tout une unité graphique. Le français est une langue faite surtout pour l’oeil. L’orthographe française est une des plus compliquées qui soient: son apprentissage exige un effort considérable. Mais elle est une garantie de stabilité et de précision de la langue française. Au point de vue sémantique le français pratique «l’arbitraire du signe». Un autre trait du vocabulaire est son caractère abstrait, ce qui le rend relativement peu expressif, mais particulièrement apte à exprimer les idées.
Bibliographie
1. Лексикология современного французского языка / Н.Н. Лопатникова, Н.А. Мовшович. – М., 1982.
2. Супрун, А.Е. Методы изучения лексики / А.Е. Супрун. – Мн., 1975.
3. Лингвистический энциклопедический словарь. – М., 1990.
4. Cours de lexicologie française / Z.N. Lévite Minsk, 1963.