Travaux dirigés
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Travaux dirigés

 

Le mot

 

A une époque qui n’est pas si éloignée, où la linguistique se confondait à peu près avec la philosophie du langage, intituler un article de quelques pages «Le mot» aurait été, de la part de linguiste, le fait d’une insupportable outrecuidance; traiter du mot, c’était en fait aborder les problèmes des rapports de la pensée et de la langue, c’est-à-dire pénétrer dans un domaine que le linguiste n’osait ni ne désirait exclure de ses recherches, mais où, pourtant, il se sentait trop démuni pour pouvoir, à lui seul, y rien faire de bon; c’était ensuite reprendre toutes les questions que pose la nature du signe, c’est-à-dire l’ensemble de la sémiologie; c’était, enfin, reconsidérer les rapports entre le mot et la phrase, d’une part, le mot et les éléments «inférieurs» de la chaîne, syllabes et phonèmes, d’autre part. La question qu’en tout cas le linguiste ne se posait guère était celle de savoir s’il existait des critères permettant, pour toute langue et dans tous les cas, d’identifier et de délimiter un segment de  la chaîne comme un mot déterminé. Pour ce faire, il aurait fallu que le linguiste soit convaincu qu’il était de son devoir de définir exactement les termes dont il se servait. Il lui aurait fallu aussi assez d’audace pour envisager d’écarter le terme «mot» au cas où la recherche aurait montré qu’il n’y a pas possiblilité de donner de ce terme une définition universellement applicable.

A. Martinet.  Problèmes du langage.

 

L’unité lexicale

 

Les formes, les éléments de la langue qui constituent le lexique, toujours considérés comme des mots dans la tradition ancienne et le langage courant, étaient de diverses sortes: Saussure parle de mots simples et composés, d’unités de syntagmes, Bloomfield -de morphèmes et de mots. Ch. Bally – de sémantèmes, Whorf – de lexèmes et encore de mots. Cette pléthore terminologique correspond à une difficulté majeure: celle de la définition de l’unité lexiale.

Tout d’abord, on s’est aperçu que la notion de «mot» reposait sur la tradition des écritures qui séparent par des espaces les suites de lettres ou de caractères, ces séparations ne correspondant pas toujours à une réalité fonctionnelle.

Cette séparation entre les mots n’est pas d’ailleurs un fait universel. Les Grecs ne séparaient pas les mots dans l’écriture.

Mais les Grecs parlaient pourtant de mots, et l’on doit donc chercher un critère autre que graphique.

L. Bloomfield a, le premier, tenté de donner une définition formelle du mot, sans recourir à l’analyse des concepts (mais en recourrant au sens). Il l’oppose à d’autres unités signifiantes: le morphème ou la forme signifiante minimale, et le syntagme. Sa procédure est analytique (partant du discours, du texte), formelle et classificatrice (taxinomique).

La première réalité linguistique qui ait accaparé la réflexion a été le mot. Dans la genèse des écritures (idéogrammes), puis dans la pensée antique et médiévale, cette réflexion lexicologique est évidemment une réflexion sur le signe.

Il existe bien une sémantique lexicologique, une psycho-, une socio-linguistique lexicologiques ; elles s’appliquent à l’objet lexical, mais ne suffisent pas à garantir l’existence d’une discipline particulière. Celle-ci doit, pour mériter d’être reconnue, s’attaquer au statut du signe-mot en tant que mot, et à l’ensemble complexe des systèmes formés par ces signes, capables d’assurer la communication linguistique, à l’intérieur du système global de la langue. Cet ensemble fait donc partie de la langue, du code, de la compétence partagée des locuteurs individuels. Si l’on étudie son fonctionnement, on passe alors à l’étude du discours, des énoncés, grâce  à quoi se manifestent les faits de la langue.

A. Rey. La lexicologie.

 

Mots, signes

 

A partir de F. de Saussure, il existe l’habitude prise d’entendre le mot comme un signe c’est-à-dire l’alliance nécessaire et indissoluble d’un signifiant (la forme, la séquence analysable en phonèmes) et d’un siginfié en vertu duquel le signifiant fonctionne dans le discours avec des valeurs communément admises.

Aucun mot, même une onomatopée, n’a à décrire ce qu’il évoque. Les mots ne s’articulent pas directement aux choses conformément à des rapports naturels. S’il en allait ainsi, il n’existerait qu’une seule langue.

Le terme de «mot» est venu assez tard en français à traduire la notion d’une unité lexicale autonome. Auparavant il signifiait plutôt une note, un son musical et c’ est de «vocable» qu’on se servait, «parole» désignant un propos. Il n’y pas à spéculer sur le fait que dans certains manuscrits anciens, le texte ne soit pas coupé comme il est d’usage de le faire aujourd’hui.

Depuis longtemps les linguistes ont manifesté de la gêne à l’égard du terme «mot». Ne parvenant pas à donner des unités lexicales une définition satisfaisante, quelques-uns iraient même jusqu’à proscrire ce terme de leur nomenclature. Dans le désir de vouloir donner du «mot» une définition générale valable pour toutes les langues, il entre une part d’illusion. Dans chaque idiome il existe des signes, qui, par intitution, renvoient à des situations. Mais outre que d’une langue à une autre, il n’y a pas de correspondance rigoureuse dans la découpe des ces dernières, chaque langue du fait de sa morphologie constitue ces unités à sa manière et selon des types particuliers. On peut donc poser autant de définitions formelles du mot qu’il y de systèmes idiomatiques. Quant à proscrire l’emploi du terme de «mot», les inconvénients pratiques de cette mesure l’emportent peut-être sur ses avantages en lexicologie. La terminologie que propose M. A. Martinet est cohérente et répond au besoin de distinguer dans le mot ce qui symbolise l’environnement non linguistique et les marques catégorielles. Monème y connote des «signes minima». Un monème est un signe indécomposable: de table, chaise, blond, rond on ne peut distraire aucun phonème et on  ne peut y remplacer aucun phonème par un autre sans priver le monème de sa qualité signifiante ou sans former un autre signe. Ces monèmes radicaux seront dits lexèmes.

R.-L.Wagner Les vocabulaires français.

 

Questions

 

1. La différence de termes pour «mot» à quelle difficulté majeure correspond – elle?

2. La notion de «mot», sur quelle tradition reposait – elle?

3. La reflexion lexicologique antique et médiévale sur quoi portait – elle?

4. Quand on traitait du problème de mot à l’époque où la linguistique se confondait avec la philosophie du langage, quel problème abordait – on?

5. La notion du mot était – elle universelle? Quelle en est la supposition?

6. D’où vient l’habitude d’entendre le mot comme un signe?

7. Les mots, s’articulent – ils directement aux choses?

8. Les trois articles proposés, sur quoi mettent – ils l’accent?

 

Bibliographie

 

1. Левит, З.Н. Лексикология французского языка / З.Н. Левит. – М., 1979.

2. Лопатникова, Н.Н. Лексикология современного французского языка / Н.Н. Лопатникова, Н.А. Мовшович. – М., 1982.

3. Тимескова, И.Н. Сборник упражнений по лексикологии / И.Н. Тимескова. – Л., 1971.

4. Чеснович, Е. П. Хрестоматия по лексикологии французского языка / Е.П. Чеснович. – Л., 1981.

5. Mel’ Cuk, I.A. Introduction à la lexicologie explicative et combinatoire / I.A. Mel’ Cuk, А. Clas,  A. Polguère, Louvain-la-Neuve: Duculot, 1995.

6. Lehmann, A. Introduction à la lexicologie. Sémantique et morphologie / A. Lehmann, F. Martin-Berthet. – Paris, 1998.